Et tu fais quoi à part être révolté ?
(Si comme moi, vous avez dans votre entourage des indignés-chroniques qui vous épuisent...
Cette lettre ouverte va peut-être vous parler !)
Un message pour toi, petit-individu-révolté.
Révolté contre la société. Révolté contre la religion. Révolté contre la bêtise. Révolté contre les carnivores. Révolté contre les médias, les cheveux cassants, les mouvements de foule, la gauche, la droite, le capitalisme, la guerre et les mauvaises odeurs…. Contre contre contre…
Mais dis-moi petit-individu-révolté, que fais-tu POUR ? Pour que la société change ? Pour que les esprits s’ouvrent ? Pour que les consciences s’éveillent ? Pour que les gens prennent confiance en eux ? Pour qu’on mange plus de carottes ? Pour que la politique soit autrement ? Pour qu’il y ait des JT de bonnes nouvelles ? Pour la paix ? Pour que tes pointes soient solides et que ça sente la fraise ?
Le souci, petit-individu-révolté, c’est que tu deviens agressif quand tu veux te faire entendre. Tu pars du principe que tu as la science-infuse et que les autres ont quelque chose comme "la connerie-infuse". Tu estimes qu’ils sont moins évolués que toi, un peu bébêtes… Et toi, tu hurles. Tu hurles ta révolte à la gueule de tes interlocuteurs et tu aimerais qu’ils comprennent ? Mais ça se saurait, depuis l’temps, si ça rendait les gens intelligents de leur aboyer dessus : « ARRÊTE D’ÊTRE UN GROS CON, ESPÈCE DE GROS CON » ! Au lieu de ça, ils se sentent agressés ou minables ou sots. Mais en aucun cas, ils se sentent encouragés à réfléchir différemment. En générant autant de négativité, tu participes à ton propre sabotage. Tu peux être animé par les plus belles causes de la planète, tu ne te feras jamais entendre avec de la colère.
Puis, remettons les choses à leur place si tu le veux bien. Tu n’es pas supérieur. Tu ne fais pas partie d’une élite. Tu n’as pas à être méprisant sous prétexte que tu as 12 masters, que tu es vegan ou que tu as vu une fois un psy. Personne n’a à être condescendant face au novice. Tout d’abord parce que celui que tu penses ignorant est peut-être super calé en volatiles croates, et il pourrait t’apprendre beaucoup ! Tu es simplement un humain, sensible, qui utilise un peu son cerveau… Jusque là, rien de bien extraordinaire. Alors oui petit-individu-révolté, tu as eu le courage de commencer à te poser des questions sur toi, sur la vie, mais ton chemin est loin d’être fini. Un peu d’humilité, s’il te plait. Un vrai sage sait ça.
En te fermant aux gens, il me semble que tu te fermes au monde. Tu peux continuer à faire cavalier-seul, mais tu auras du mal à atteindre tes buts. Tu auras "besoin" des autres à un moment donné. Besoin de leur sagesse, de leurs conseils avisés, de leur expérience dans certains domaines ou peut-être simplement de leur pognon ! Qu’on s’entende bien : il ne s’agit pas de faire copain-copain avec des crétins et d’en perdre ton intégrité, il s’agit simplement d’être ouvert, curieux, tolérant et de prendre ce qu’il y a à prendre chez Monsieur et Madame Tartampion. C’est trop fastoche de jouer la carte de l’incompris-de-service pour éviter de s'atteler réellement à ses projets. Un conseil petit-individu-révolté : essaie de mettre ton orgueil de côté 3 minutes et prends le temps de regarder des photos de chatons dans Google-Image. Tu vois, le monde n’est pas dans un état de putréfaction avancée comme tu le crois.
Puis, pardonne-moi, mais il me semble déceler chez toi des incohérences. Pourquoi fumes-tu toi qui est si indépendant ? Pourquoi t’est-il impossible de sortir sans ton maquillage/ton gel toi qui prône tant la vérité ? Pourquoi suis-tu autant la mode toi qui te veut en dehors de toute démarche conventionnelle (ça vaut aussi pour toi petit hipster qui achète des pulls Cacharel chez Emmaus) ? Pourquoi es-tu si dépendant à ton miroir ? Pourquoi bois-tu autant quand tu fais la fête ? Pourquoi es-tu si dur ? D’où vient cette systématique envie de chercher le conflit ? Pourquoi réclames-tu autant d’attention ? Pourquoi as-tu tant de mal à t’avouer faible ? Pourquoi remets-tu tout en question sauf l’environnement dans lequel tu as grandi ? Pourquoi es-tu si virulent quand on évoque les probables erreurs de tes dieux ?
Moi je m’en fiche de ton style, de ton gel et de la marque de tes clopes. Je vois juste un enfant qui crie et qui est incapable d’écouter tant il est enfermé dans sa colère. Et pour le coup… je sais. Je vois. Je sens. Je suis simplement moins éloquente que toi. Comme quoi… tu as exactement les mêmes soucis émotionnels que M.Martin qui s’engueule tous les matins avec sa boulangère… Et tu as tout autant de chances que lui de tomber malade.
Je te souhaite de guérir petit-individu-révolté.
Et après seulement, tu pourras prétendre guérir la planète.
Madelone Smith.